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Notre équipe sociale revient brièvement sur des nouveautés en matière de télétravail (caractérisation d’un accident du travail pendant le télétravail, le télétravail transfrontalier en Europe, et les nouveautés à intégrer dans les accords/chartres) ainsi que sur l’entrée en vigueur du nouveau régime social applicable à la rupture conventionnelle individuelle.
La France a ratifié le 30 juin 2023 un Accord-cadre multilatéral, entré en vigueur le 1er juillet dernier, applicable au sein des pays faisant partie de l’Union européenne et de l’Espace économique européen et ayant eux-mêmes ratifié ledit accord. A ce jour 19 pays ont ratifié cet Accord-cadre dont la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne, la Suisse, l’Espagne, ou encore le Portugal.
Aux termes de cet Accord-cadre, un télétravailleur habituel (dont la définition est rappelée à l’Accord-cadre), qui exerce moins de 50% de son temps de travail en télétravail dans l’Etat de résidence, et donc plus de 50% de son temps de travail dans l’Etat dans lequel son employeur a son siège social ou d’exploitation, peut rester attaché au régime de sécurité sociale applicable de l’Etat d’emploi.
Il s’agit ici d’une dérogation au Règlement CE/987/2009, qui prévoit en son article 14 § 8 le principe d’affiliation au régime de sécurité sociale du pays au sein duquel le travailleur transfrontalier, en télétravail ou non, exerce une part substantielle de son activité caractérisée par un seuil de 25% du temps de travail. Aussi, au-delà de 25% d’activité dans l’Etat de résidence, le travailleur transfrontalier doit être affilié au régime de sécurité sociale du lieu de résidence et non d’emploi.
L’Accord-cadre permet donc de pérenniser les mesures dérogatoires mises en place pendant la crise sanitaire liée à la Covid-19. Cette dérogation demeure optionnelle. Si les parties souhaitent activer cette option, l’employeur sollicite un formulaire A1 aux autorités de son pays, et prouve que la dérogation est faite dans l’intérêt du travailleur (la preuve de son accord suffit en principe).
Sa durée d’application est de cinq ans, période durant laquelle les règlements européens de coordination des régimes de sécurité sociale devraient être modifiés avec une première évaluation après une première période de 6 mois.
La loi n°2023-622 du 19 juillet 2023 visant à renforcer la protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap ou victimes d'un accident d'une particulière gravité a modifié l’article L. 1222-9 du Code du travail.
Dorénavant, il est prévu que l’accord collectif, ou à défaut la charte adoptée au sein de l’entreprise portant sur le télétravail doit préciser les modalités d'accès au télétravail des salariés aidants d'un enfant, d'un parent ou d'un proche à une organisation en télétravail. Le caractère obligatoire d’une telle précision avait déjà été prévu pour les salariés handicapés et pour les salariées enceintes.
Cet article ne précise pas en pratique quelles sont les modalités à retenir.
Il n’existe pas non plus de sanction en cas d’absence de ces mentions. Néanmoins, un salarié en situation d’aidant qui se verrait refuser l’accès au télétravail pourrait, à défaut de mentions, demander à l’employeur de justifier son refus, et le cas échéant demander des dommages et intérêts, s’il démontre un préjudice lié à un refus injustifié.
En application de l’article L. 1222-9 du Code du travail, l'accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l'exercice de l'activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail. En l’absence de contrôle de l’employeur sur le lieu d’exercice du télétravail, on peut facilement craindre une reconnaissance systématique des accidents de travail.
Deux arrêts viennent néanmoins encadrer de manière stricte les conditions dans lesquelles s’apprécie le caractère professionnel d’un accident intervenu pendant le télétravail.
Dans la première espèce (CA St Denis de la Réunion, 4 mai 2023, n°22/00884), un salarié en télétravail perd sa connexion Internet. Il sort, hors de son domicile, pour chercher l’origine de la panne informatique, et à cette occasion est blessé par la chute d’un poteau. Le caractère professionnel de l’accident n’est pas reconnu : la Cour d’appel considère, en effet, que le salarié a délibérément interrompu sa mission pour procéder à la recherche de la cause de l’interruption d’accès à Internet, ce qui ne lui était pas demandé par son employeur ni relevait de ses compétences. Qui plus est, il ne se trouvait plus sur son lieu de « travail ».
Dans la seconde espèce (CA Amiens, 15 juin 2023, n°22/00474), une salariée termine sa journée de travail à 16h01. A 16h02, quittant l’espace en sous-sol dans lequel elle télétravaille, elle chute dans l’escalier. Ici encore, le caractère professionnel de l’accident n’est pas reconnu. La Cour d’appel considère qu’à 16h02, la salariée avait terminé sa journée de travail, et n’était donc plus sous la subordination de l’employeur.
Bien que ces arrêts puissent sembler sévères, ils permettent de marquer une frontière clairement définie entre le moment où le salarié télétravaille sous l’autorité de l’employeur, et le moment où le salarié quitte cette autorité pour reprendre sa vie personnelle.
Ces décisions ne sont pas à l’abri d’être remises en cause par la Cour de cassation. Affaires à suivre.
Le forfait social de 20% applicable aux indemnités spécifiques de rupture conventionnelle est remplacé, depuis le 1er septembre 2023, par une contribution patronale de 30% due sur la fraction exonérée de cotisations de sécurité sociale.
Cette modification, introduite par l’article 4 de la Loi n°2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, et intégrée au BOSS, concerne toutes ruptures conventionnelles prenant effet à compter du 1er septembre 2023, ce qui implique donc des procédures débutées avant cette date.
A noter que cette loi introduit également d’autres modifications, dans la mesure où elle supprime, en ce qui concerne uniquement l’assujettissement aux cotisations sécurité sociale, le distinguo avec les salariés pouvant bénéficier d’une pension de retraite. Aussi, indépendamment d’un droit de départ à la retraite, l’indemnité demeure exonérée de cotisations de sécurité sociale et de CSG/CRDS dans les limites usuelles.
Toutefois, ce distinguo demeure toujours en vigueur en matière fiscale. Aussi, l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle demeure intégralement assujettie à l’impôt sur le revenu pour les salariés en droit de bénéficier d’une pension de retraite.
Rédigé par Alexandra Tuil et Baptiste Camus.